🎶 Le prochain hit de l'été sera produit par une IA
+ Encore du drama chez Twitter et dans l'univers crypto
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👀 Ce qu’il ne fallait pas louper la semaine dernière
🐦 C’est toujours la panique chez Twitter
Twitter perd $4 millions tous les jours et Musk a donc licencié 50% du staff de l’entreprise (y compris à des postes clés, mettant en péril la stabilité du réseau).
Les salariés licenciés continueront à recevoir leur salaire jusqu’au 2 février et partiront avec une prime.
(Vous pouvez lire le mail envoyé aux salariés de Twitter dans son intégralité ici )
Financièrement, la plupart des ex-employés n’ont aucun souci à se faire.
Ce n’est pas le cas en revanche des travailleurs étrangers dont le visa américain était lié à leur contrat chez Twitter. Maintenant qu’ils sont sans emploi, ils ont 90 jours pour retrouver un poste avant de devoir quitter les États-Unis.
Pour ce qui est du fonctionnement de la plateforme, Twitter multiplie les expérimentations, en déployant de nouvelles fonctionnalités avant de les retirer quelques heures plus tard.
Si l’entreprise donne l’impression de ne pas savoir où elle va, c’est parce que c’est le cas :

En 🇫🇷 : “Twitter continuera à faire des tas de trucs idiots dans les prochains mois. Nous garderons ce qui fonctionne et changerons ce qui ne fonctionne pas.”
Plusieurs employés ont parlé anonymement à la presse américaine et décrivent une ambiance chaotique :
“C’est comme le hackathon, mais avec un flingue sur la tempe”
Tout ça profite (temporairement en tout cas) à Mastodon, une plateforme allemande qui fonctionne plus ou moins comme Twitter.
L’application vient de dépasser le million d’utilisateurs mensuel.
🪣 Meta licencie 11.000 personnes soit 13% de ses salariés
Pour construire son Métaverse et lancer tous les projets annexes sur lesquels l’entreprise a travaillé ces dernières années, Meta a beaucoup recruté.
Problème : le Métaverse est loin d’être arrivé à maturité et les autres projets de Facebook sont tous à la poubelle.
(Vous vous souvenez de Libra, la cryptomonnaie de Facebook ? Ou de Lasso, l’app qui devait tuer TikTok ? Ouais, moi non plus. )
On ne sait pas qui sont exactement les salariés mis à la porte, mais il est probable que les équipes arrivées pour travailler sur Lasso et Libra fassent partie des premiers à partir.
Ajoutez à ça le ralentissement des revenus publicitaires suite aux nouvelles règles de confidentialité d’Apple et vous arrivez à ce licenciement de 11.000 salariés.
Meta reste quand même une boite énorme et compte encore 3 fois plus de salariés qu’en 2017, c’est dire la vitesse à laquelle ils ont recruté ces dernières années.
À noter qu’ils ne sont pas les seuls à licencier avec Twitter donc, mais aussi Stripe qui réduit ses effectifs de 14%.
Qui a dit que travailler chez un géant de la tech était la garantie d’un emploi stable et tranquille ?
📉 La plateforme FTX disparaît
Vos potes qui détestent la crypto vont adorer cette info.
FTX, l’une des plus grosses plateformes d’échanges de cryptos s’est effondrée en à peine quelques jours.
L’info est une double surprise parce que :
FTX était vu comme l’une des plateformes les plus stables et les plus sérieuses dans un écosystème encore chaotique.
Mardi dernier, le CEO de FTX annonçait avoir trouvé un accord pour revendre sa société à Binance… Mais le deal a été abandonné après que Binance ait annoncé avoir découvert un “trou noir financier” dans les comptes de FTX.
Il y a moins d’un an, FTX levait successivement $900 millions et $600 millions pour atteindre une valorisation de $32 milliards. Aujourd’hui elle ne vaut plus rien.
C’est catastrophique pour les millions de clients qui avaient utilisé la plateforme pour acheter des cryptos et qui ne pourront pas récupérer leur argent…
Et dans une moindre mesure pour Sam Bankman-Fried, le CEO de FTX qui a vu sa fortune personnelle s’effondrer de 94%.
(Quoique, maintenant que la justice américaine s’apprête à mettre son nez dans l’histoire, il pourrait risquer gros si l’enquête estime que sa société a utilisé l’argent de ses clients à mauvais escient.)
Dans tous les cas, c’est une mauvaise nouvelle pour tout l’écosystème qui ne risque pas de débarrasser de son étiquette d’économie louche et risquée de sitôt.
Si vous investissez dans les cryptos, c’est un bon rappel que tant que votre argent est sur une plateforme et pas sur un Wallet : il peut s’envoler à tout moment.
🦾 Deep Dive : Le vrai problème avec l’IA n’est pas celui auquel vous pensez
Chaque semaine, une plongée dans les profondeurs d’une des sujets les plus intéressants de la tech.
⏱️ Temps de lecture : 5 minutes.
Si vous êtes allé sur Internet au cours des 15 derniers jours (ce qui est hautement probable), vous avez forcément entendu parler de Dall-E, Stable Diffusion, Midjourney et tout le bazar créé par les nouvelles IA de génération d'images.
(Si vous n'avez jamais essayé, mettez cet email dans un coin et allez vous amuser avec Dall-E quelques minutes. Vous allez voir, on devient vite accro.)
Est-ce que tous les professionnels de la création vont se retrouver au chômage ?
Probablement pas tout de suite.
Mais avant de voler le travail des artistes, les IA commencent déjà à leur voler autre chose de tout aussi important :
La propriété de leur travail.
⚠️ Avant d'aller plus loin, je précise que je n'ai aucun bagage juridique particulier. Tout ce qui suit est basé sur les recherches que je mène depuis quelques semaines. Comme toujours, je fais au mieux pour vous donner toutes mes sources.
⚠️ Les questions de droits d'auteur peuvent être aussi chiantes que de compter des grains de riz dans une paella, mais promis : on va rendre ça sympa.
🌆 Comment fonctionne une IA de génération d’images ?
Pour comprendre le problème, je dois revenir rapidement sur le fonctionnement de ces outils.
Imaginons que notre intelligence artificielle s'appelle Steve.
Mon objectif est que Steve soit capable de dessiner n’importe quelle idée farfelue que je luis décris.
Pour y arriver, voilà (très simplement) ce que je dois faire :
Je rassemble une quantité astronomique d'images trouvées un peu partout sur Internet.
Je les montre une à une à Steve en lui indiquant ce qu'elles représentent - "C'est un crayon, c'est une valise, c'est une loupe"
Plus je suis précis, plus Steve fera du bon travail derrière : "C'est une rose" est une meilleure indication que "c'est une fleur"
(Vous pouvez voir concrètement à quoi ça ressemble ici avec une base de données d'images de vêtements tirés de Zalando)
Une fois que Steve aura vu assez d'images, il sera capable de comprendre ce à quoi peut ressembler "un hérisson déguisé en cornichon, dans un style d'art digital" 👇
Cette image vient de Dall-E 2.
Aucun n'artiste n'a jamais dessiné ça auparavant et Dall-E l'a créée de toutes pièces en moins de 15 secondes.
Si vous vous renseignez, les conditions générales d'utilisation de Dall-E 2 précises que l’utilisateur a 100% des droits sur les images qu’il crée.
Autrement dit, je peux mettre ce magnifique hérisson sur des t-shirts, des canettes de soda ou même sur le maillot d'une équipe de foot sans être inquiété légalement.
Mais comme je vous l'ai dit : Dall-E n'a pas vraiment inventé ce dessin. Il l'a plutôt assemblé à partir de toutes les images que je lui ai données...
Dont certaines sont protégées par des droits d'auteurs, et c’est là que les ennuis commencent.
Si une IA comprend ce qu'est l'art digital, l'impressionnisme ou le style Van Gogh, c'est qu’elle a dans son Data Set (sa base de données) des éléments qui y correspondent.
Et il va sans dire que les concepteurs de ces IA n’ont pas pensé à payer le droit d’utiliser chacun des images sur lesquelles ils ont entraîné leur outil.
🎸 Et si Johnny ressortait un album en 2023 ?
On arrive au coeur du problème :
Si je donne à une IA la discographie entière de Johnny Halliday (oui, parce que les IA ne font pas que dessiner, elles chantent aussi) et que je lui demande de créer 12 morceaux totalement inédits...
Aucune loi ne m'oblige à verser le moindre centime à sa famille.
The Verge a interrogé un avocat spécialiste du droit d'auteur pour en savoir plus, voilà ce qu'il en dit :
Pour que l'on puisse m'attaquer (et gagner) en justice, il faudrait :
Soit prouver devant un tribunal qu'une des chansons de mon Johnny IA-lliday ressemble à un morceau de sa discographie. (Par exemple si la mélodie est la même que "Allumer le Feu")
Soit que le titre de l'album mentionne le nom de Johnny Halliday, sans que j'en ai obtenu l'accord.
Soit que la famille Halliday arrive à prouver que j'ai entraîné mon IA sur la discographie de Johnny sans en avoir le droit.
Cette dernière option est hautement improbable car je pourrais légitimement défendre devant un tribunal que le fonctionnement de mon IA est un secret industriel.
Mais allez : supposons un instant qu’une loi décide qu’il est interdit d’entraîner une IA sur l’oeuvre d’un autre artiste.
Cela dissuaderait probablement les “IA-rtistes” de s’inspirer des chanteurs les plus célèbres qui ont les moyens d’entamer des poursuites judiciaires…
Mais pour les artistes indépendants ou moins connus ? La loi ne changerait sans doute rien.
Même si vous êtes convaincus qu’un morceau est un plagiat de votre travail, vous devez encore le prouver.
Or, remonter à la source du travail d’une intelligence artificielle est pour ainsi dire impossible à moins de vous entourer des meilleurs ingénieurs et avocats du secteur.
✍️ J'ai pas signé pour ça !
Imaginons un jeune acteur (oui, l'IA fait de la vidéo aussi. Vous avez entendu parler des deepfakes ?) qui désespère de faire décoller sa carrière.
Aujourd’hui, il n’a pas d’autre choix que de multiplier les castings, les projets amateurs et d’envoyer sa bande démo partout où il peut.
Mais même avec toute la bonne volonté du monde, il n’a que 24h dans une journée et ne peut pas être sur 5 tournages à la fois.
Mais le jour où il pourra signer un contrat afin que son image soit utilisée dans plusieurs projets en même temps, sans même qu’il ait à jouer devant la caméra ?
L’offre est trop belle pour dire non.
Tout à coup, il n’a plus besoin de courir après LE projet qui va faire décoller sa carrière et lui permettre d’être bien rémunéré :
Il peut juste vendre son double virtuel à une agence qui se charge de le faire apparaître dans le plus de petits projets possibles et cumuler les petits chèques.
Sauf que !
À partir de là, il perd possession de son identité et peut figurer dans des films ou des séries où il n’avait pas envie d’être.
“Tu n’es pas d’accord ? Trop tard, le film a été diffusé et s'il est mauvais personne ne se demandera si c'est bien toi ou ton double numérique qui joue dedans.”
Ces outils pourraient être également détournés pour ternir la réputation d'un artiste en créant par exemple une mauvaise chanson et en la diffusant sur Internet.
Ce n'est qu'une question de temps avant que quelqu'un poste sur Twitter (parce que c'est toujours sur Twitter que ces trucs arrivent) une fausse chanson d'Angèle avec des paroles racistes / antisémites.
Elle aurait beau ensuite démentir et expliquer ce n'est pas elle, le mal est fait.
Après tout : s'il suffisait d'un démenti pour que les gens ne croient pas aux fakes news et aux usurpations d'identité en ligne, ça se saurait.
🏆 Est-ce qu'une IA pourrait recevoir une victoire de la musique ?
Si un prof de philo me lit, j'ai un super sujet pour le bac de 2030 :
"Si j'entraîne une IA et qu'elle crée un morceau qui devient un tube, qui en est l'auteur ?"
L'IA, ou moi ?
Si c'est l'IA, ça veut dire qu'on reconnaît qu'elle a eu une intention artistique ?
Donc qu'elle est capable de créer ? Qu'elle est consciente ?
Et d'ailleurs, à qui vont les revenus générés par ce morceau ?
On a compris que l'artiste sur lequel l'IA s'est entraîné ne toucherait rien, mais est-ce qu'une IA peut gagner de l'argent ?
Si oui, qu'est-ce qu'elle en fait ? Elle achète quoi avec ? Elle le stocke où ?
En 2017, la justice américaine avait déclaré qu’un singe ne pouvait pas détenir de droits d’auteur, la loi américaine ne couvrant pas les animaux à ce propos.
Pour l’instant, la notion d’intelligence artificielle n’a jamais été évoquée par un tribunal, mais ça ne saurait tarder.
Comme souvent, nos institutions courent après le progrès technique et tentent de le réglementer à la hâte pour limiter la casse.
Avec l’IA, les dégâts sont encore mineurs. Mais le potentiel de destruction est tel qu’il ne sera jamais trop tôt pour s’y attaquer.
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À lundi prochain !
Sami
Les questions juridiques et philosophiques sur l'IA sont passionnantes.
On est vraiment à un tournant.
Les philosophes et les penseurs vont avoir un rôle à jouer sur ces questions très complexes. En fonction de notre définition de l'art, les IA's pourraient bien devenir les plus grands artistes du siècle.
Sans mentionner la révolution sur l'aspect pratique.
Un réalisateur de film souhaite tester des visuels et des ambainces, on peut très imaginer qu'il utilise les IA pour explorer des dizaines voire des centaines de pistes. Et il creusera ensuite (sans IA) celles qu'il préfère.
On peut également imaginer une oeuvre comme Dragon Ball qui serait redessinné avec le style de Murata, de Miura ou de Kishimoto. Cela pourrait fonctionner comme un simple filtre.
Si ça va encore plus loin et que les IA sont en mesure de réaliser des films de A à Z avec un film de Super Héros avec une réalisation à la Tarantino ou Fincher